Henri Louis PROVANDIER naquit le 4 octobre 1866 à Blois. Après avoir fréquenté l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, il obtient une licence de lettres. Nommé en qualité de professeur de lettres au lycée de Montluçon en 1890 il y exerce cette activité jusqu’en 1929.
En 1904 il épouse Rose Esther, fille du frère Philippe BARDET, Vénérable Maître de la loge de 1902 à 1907, et plusieurs fois Conseiller de l’Ordre.
Après 1918 il devient vice-président du Patronage laïque de Montluçon. Il en devient président de 1935 à 1936 et à nouveau vice-président jusqu’en 1940. Au sein de cette association il joua un rôle marquant au cours de toutes ces années.
En 1928 il est fait officier de l’Ordre yougoslave de Saint-Sava, et décoré de la Légion d’Honneur en 1938.
Parcours maçonnique
Son parcours maçonnique est assez exceptionnel : Initié en 1904, Compagnon en 1905 et Maître en 1907, il devient le Vénérable Maître emblématique de la première moitié du XXème siècle, d’abord de 1913 à 1919, puis de 1924 à 1940, de la loge « Union et Solidarité » de Montluçon. Entre 1913 et 1935 il représente de nombreuses fois sa loge au Convent du Grand Orient de France en qualité de délégué.
Il s’affilie en 1919 à la loge « La Cosmopolite » de Vichy et en 1924 à la loge « Equerre » de Moulins.
Il est élu quatre fois au Conseil de l’Ordre à partir de 1921.
Président du Chapitre « Union et Solidarité » une première fois en 1914, il exerce cette fonction de façon ininterrompue de 1921 à 1940, ainsi que la présidence de l’Aréopage « Les Enfants de Gergovie » à Clermont-Ferrand en 1925.
La Résistance
Pendant la période de l’Occupation, en octobre 1941 il a l’honneur d’être cité, avec d’autres Francs-Maçons, par le journal Officiel de l’Etat Français. Dès juin 1940 il avait pris la précaution d’enterrer les épées de la loge dans son jardin. Restituées en novembre 1944, elles conservent encore la trace des piqûres infligées par la rouille.
Membre du groupe Combat de Lyon, mis sous surveillance policière, il a droit à sept visites domiciliaires, et fait l'objet de perquisition quatre fois, dont une de nuit par la Gestapo. Il n’échappe à l’internement qu’en raison de son grand âge.
Sa réintégration est refusée
La vie d’une loge ou d’un Chapitre n’est pas un long fleuve tranquille. La vie maçonnique de Henri PROVANDIER le prouve, puisque sa réintégration fut refusée par la loge « Union et Solidarité » en 1945. Dans le cadre de la procédure de réintégration dans sa loge, le frère Henri PROVANDIER envoyait le 28 novembre 1944 le message suivant au secrétariat du Grand Orient de France, en réponse à la demande de renseignements :
- Activités au cours de ces quatre dernières années : « Je me tenais en relation de renseignements avec le groupe Combat de Lyon. Une note de ce groupe trouvée chez moi par la police eut pour effet de me valoir la visite d’un policier sur mission et commission rogatoire du procureur de Lyon ».
- Avez-vous été démissionnaire ou révoqué au titre de la Franc-Maçonnerie ? « Évincé par la mairie de Montluçon du Conseil d’Administration de l’Office des habitations à bon marché, dont j’étais l’un des fondateurs ».
- Avez vous été arrêté, emprisonné par la police de Vichy ? « Mon état de santé qui est grave par suite de broncho-pneumonie, et mon grand âge (il avait 78 ans) ont seuls empêché mon internement. Mais je fus averti que je serais soigneusement surveillé ».
- Avez-vous eu à souffrir des activités de certains de nos frères ? « J’ai souffert moralement de la veulerie de certains maçons qui, dehors, faisaient semblant de ne pas me connaître ».
- Avez-vous été attaqué personnellement par la Presse de Vichy ? « A maintes reprises, elle m’a signalé en tant que membre du Conseil de l’Ordre et Garde des Sceaux. J’ai répondu en effet que je gardais les sots et que je me tenais à leur disposition. Affiches et placards injurieux collés la nuit sur ma porte et comportant des menaces ».
Le frère Henri PROVANDIER ajoutait :
« Pendant l’exode de juin 1939 (sic), j’ai recueilli chez moi à maintes reprises des familles de gens qui fuyaient les régions envahies, et j’ai organisé ici, dans mon quartier, des œuvres d’assistance pour les fugitifs et surtout pour les enfants, le tout à mes frais. J’ai abrité et nourri des maçons en danger et qui, étant israélites, devaient se cacher. J’ai été convoqué plusieurs fois par la police de sûreté, dont j’ai subi sept visites, quatre perquisitions, dont l’une a duré six heures consécutives. La Gestapo a opéré chez moi, en pleine nuit, une perquisition prolongée, à la recherche vaine d’un poste d’émission clandestin. Ce qui m’a valu une grosse rechute de broncho- pneumonie ».
En bas de la page figure une note : Avis de la Commission d’Enquête :
« Provandier doit demander sa réintégration à sa loge d’origine à Montluçon ».
Résultat du vote : « Candidature rejetée par la loge ».
Voici le contenu de la lettre adressée au Grand Orient de France le 2 juillet 1945 par le Vénérable Maître André BOUCHERAT :
« J’ai l’honneur de vous adresser ci-dessous la liste des objets mobiliers qui ont
été soustraits à notre atelier en août 1940 ». Suit une liste comprenant de la vaisselle, des poêles pour le chauffage, deux bibliothèques garnies de livres, des tables, des chaises, six tables triangulaires qui doivent pourtant être celles présentes aujourd’hui dans ce temple, et tous les objets nécessaires au rituel. Le frère BOUCHERAT ajoute : « Tous ces objets mobiliers ont été enlevés sous la direction de l’ex-frère PROVANDIER qui refuse de nous faire connaître la direction prise par chacun de ces meubles. Alors que toutes les loges de France et de Navarre ont été spoliées par des adversaires, nous avons ici l’exemple peut-être unique d’un atelier détroussé par son propre Vénérable Maître ».
A la décharge du frère Henri PROVANDIER, il est probable qu’il n’avait
peut-être plus l’intégralité de son libre arbitre et de sa conscience à cette époque. Il est d’ailleurs décédé peu de temps après, le 16 décembre 1945.