On observe une évolution en dent de scie de la Franc-maçonnerie au cours du XIXème siècle, que l’on peut scinder en trois grandes périodes : la première comprend le Consulat et l’Empire ; la deuxième va de la Restauration à la première moitié du Second Empire, et comprend les deux Révolutions de 1830 et 1848 et la deuxième République ; la troisième commence pendant l’Empire libéral et se poursuit sous la troisième République, au cours de laquelle, et jusqu’en 1940, les Loges auvergnates vivent un certain âge d’or.
Après le sommeil de la plupart des Loges au cours de la Révolution, sous le Consulat et l’Empire on assiste dans les quatre départements auvergnats à un développement rapide et aussi intense que celui de la deuxième moitié du XVIIIème siècle. Certaines Loges sont réveillées comme «Saint-Julien» de Brioude, qui poursuivra son activité jusqu’en 1831, «La Parfaite Union» du Puy-en-Velay, qui sera active jusqu’aux environs de 1812, «Saint-Joseph de Zorobabel» d’Aurillac qui figure dans l’annuaire du GODF jusqu’en 1813, «L’Espérance» de Moulins et «Les Cœurs Unis» à Saint-Pourçain-sur-Sioule, qui seront actives jusqu’en 1814. Et les créations sont nombreuses ! Mais l’existence des loges est brève et se poursuit rarement au-delà de 1815 : à Gannat (Allier) la Loge «Aurore» voit le jour en 1808. En Haute-Loire, deux loges sont créées : au Puy-en-Velay les Loges «La Parfaite Sincérité» en 1804 et «Les Amis Eprouvés» en 1810 ; à Yssingeaux «Les Vrais Amis» en 1810. Toutes ces Loges n’auront plus d’activité après 1812. Dans le Cantal à Saint-Flour, les Frères des deux Loges existant avant la Révolution, «Saint-Jean de Sully» et «Saint-Vincent», décident de fusionner en 1802 pour créer la Loge «La Parfaite Union». A Aurillac la Loge «Les Amis du Gouvernement», créée en 1803, est active jusqu’en 1816 et devient «Les Amis du Roy» en 1817, mais ne semble plus avoir alors d’activité. A partir de 1815, si la Franc-Maçonnerie est tolérée par le pouvoir de la Restauration, les loges sont soupçonnées d’abriter de nombreux opposants ou d’être noyautées par la «Charbonnerie». Elles font donc l’objet d’une étroite surveillance qui amène la plupart de ces loges à se mettre en sommeil. Certaines disparaîtront complètement. Néanmoins, dans les centres urbains importants, l’activité maçonnique persistera.
Dans l’Allier, à Montluçon, est créée la Loge «Le Phénix» en 1831, mise en sommeil en 1835 et réveillée de 1848 à 1852. A Commentry, une tentative de création pendant la deuxième République a échoué en 1851. De 1820 à 1855, Moulins est le siège de plusieurs Loges qui se caractérisent par la brièveté de leur existence : «D’Isis» de 1820 à 1826, «Saint-Pierre des Vrais Amis» en 1830, «Le Parfait Accord» en 1831, «Mars et Union» (Loge militaire) en 1835 et en 1852, «Paix et Union» de 1836 à 1855 et «L’Humanité» de 1848 à 1850 et dans la clandestinité de 1851 à 1855. Dans la région de Vichy, à Cusset, est installée en 1849 la Loge «Les Amis de la paix» affiliée au Suprême Conseil de France. Il faut attendre la période libérale du second Empire pour voir renaître la Franc-Maçonnerie en Auvergne. Et c’est dans le Cantal qu’est installée à Aurillac la première Loge en 1865, sous le nom de «La Libre Pensée». C’est à cette Loge que le Grand Orient de France donne mission d’installer, à Clermont-Ferrand, en 1868, la Loge «Les Enfants de Gergovie». Cette dernière participera fortement à la création de la Loge «La Ruche Encyclopédique», qui aura une brève existence à Thiers de 1869 à 1870, ainsi qu’à celle des Loges «La Cosmopolite» à Vichy en 1869 et «Union et Solidarité» à Montluçon en 1890. Avec l’appui de frères de Nevers, la Loge «Equerre» est créée à Moulins en 1887. Au Puy-en-Velay les frères des loges «L’Industrie» et «Les Travailleurs Unis» apportent leur concours pour la création de la Loge «Le Réveil Anicien» en 1893. En dehors de «La Ruche Encyclopédique» et de «La Libre Pensée», qui a cessé son activité en 1907, les trois Loges de l’Allier, celles du Puy-en-Velay et de Clermont-Ferrand ont surmonté les difficultés, les crises et les deux guerres mondiales, et continuent à rayonner sur leur territoire.
Dès 1901 on assiste à deux créations dans le Puy de Dôme: l’une à Issoire, avec la Loge «Raison et Solidarité», qui a pu être installée grâce à l’apport de frères qui avaient, préalablement, été initiés par la Loge «Les Enfants de Gergovie». La deuxième création est le fruit de dissensions internes à cette dernière et a donné naissance à la Loge «Les Philanthropes Arvernes» qui a cessé d’exister au cours de la première guerre mondiale, et dont les frères ont rejoint «Les Enfants de Gergovie» à la fin de 1917. Peu après la guerre, cette même Loge a préparé la création à Thiers de la Loge «Justice» qui a été installée en 1923. Puis en 1937 elle a apporté son concours pour la création, dans le Cantal, à Aurillac, de la Loge «La Cité Fraternelle». Depuis la création de la première Loge mixte du Droit Humain en 1893, l’Auvergne ne comptait aucune Loge de cette obédience. Le frère Dionnet, de la Loge «Les Enfants de Gergovie», dont l’épouse avait été initiée par la Loge «Maria Deraisme» du Droit Humain, a mobilisé les membres de sa Loge pour aider à la création, à Clermont-Ferrand, en 1908, de la première Loge mixte de cette obédience sous le nom d’«Arya» . Cette Loge a essaimé en 1911 à Vichy où a été installée la Loge «La Paix» qui s’est mise en sommeil au cours du premier conflit mondial. Les huit Loges d'Auvergne du GODF et la Loge «Arya» du DH en activité avant la deuxième guerre mondiale ont dû se mettre en sommeil sous l’Occupation entre 1940 et 1944. Elles ont repris leurs travaux après la guerre et sont toujours en activité.